Dès le mois de Septembre 1939, les écoliers Parisiens en vacances, apprenant que leurs écoles, collèges ou lycées resteraient fermés, se demandaient comment leur scolarité se poursuivrait.
Heureusement l'Université maternelle "Alma Mater" multiplia ses efforts pour organiser l'ouverture d'établissements d'enseignements provisoires dans les lieux de villégiatures ou les écoliers étaient demeurés les plus nombreux.
Lycées ou collèges s'ouvrirent pour la durée de la guerre jusqu'au bord même des plages à la mode.
C'est ainsi qu'à Saint-Quay-Portrieux sous la direction de Monsieur MONARD, proviseur du Lycée "Anatole Le Braz"de Saint-Brieuc chacun s'affaira pour transformer en salles de classes des locaux de fortune. Le 2 Octobre 1939 le Lycée ouvrait à Saint-Quay-Portrieux :
La sixième se fait dans une salle de jeux du Casino, la cinquième dans une boutique de coiffeur, la quatrième dans l'ex-charcuterie !
On fait les devoirs sur des tables de café et on est assis sur des chaises de jardin. On est au piquet au coin de la rue...Et la cour de récréation...c'est la plage déserte qui n'avait hors saison, jamais vu tant de jeunesse. Ainsi la France réalise par la force des circonstances ce que l'Angleterre pratique depuis longtemps: le collège au bord de la mer. Les petits Parisiens s'y portent bien et y travaillent bien. La Maison "Ty Huel" située en bas de la rue Jeanne d'Arc était alors surnommée "La tourelle de la maison des bons élèves". Chaque semaine cette maison abritait les élèves les plus méritants de la semaine passée.
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Ces bâtiments aujourd'hui détruits se dressaient devant l'actuelle Maison de la Presse. En arrière plan la Congrégation Religieuse. |
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Drôle d'école... |
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"La Tourelles de la maison des bons élèves" |
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Août 1944. La plage du Casino hérissée de tripodes en béton et de pieux de bois surmontés de mines |
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Troupes Allemandes dans le port de Saint-Quay en 1942 |
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Troupes Allemandes dans le port de Saint-Quay en 1942 |
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Troupes Allemandes dans le port de Saint-Quay en 1942 |
Juin 1940
Mercredi 19 juin. Tous les habitants
sont sur les dents, sur le pas de leur porte ou errant dans les rues. Les
blessés envahissent les artères principales de Saint-Quay-Portrieux et les
abords de la plage. Aucune discipline : c’est une véritable Cour des
Miracles. Tout le monde est en quête de nouvelles et veut en savoir plus long
que son voisin. On est à l’écoute de la radio. Le bureau de poste est fermé,
ainsi que les boîtes aux lettres. Le courrier ne part ni n’arrive. Nous avons
un avant-goût de l’occupation. On a vu les premiers soldats allemands à
Saint-Quay-Portrieux : un motocycliste qui roulait en direction du
sémaphore et un autre qui traversait la grande rue à toute allure, vers Plouha.
Hier
au soir, à l’heure où se formait le gouvernement Pétain qui abandonne lâchement
la lutte, nous avons écouté sur l’antenne de Londres le message revigorant que
le général de Gaulle, en mission dans la capitale anglaise, adressait aux
Français. Il invite tous les officiers et les soldats à se joindre à lui pour
la résistance.
Jeudi 20 juin. Je stationne avec un
groupe d’amis devant la terrasse du Saint-Quay Bar pour capter les dernières
nouvelles que diffuse à 18H15 la radio anglaise. La foule est dense et commente
passionnément les évènements. Presque tous espèrent que le gouvernement
rejettera les conditions d’armistice du Reich.
Soudain
une pétarade de moteurs éclate et en ouragan défilent devant nous : une
auto militaire allemande, une motocyclette et quatre side-cars, mitrailleuses
braquées sur les deux rives de la route. Dans la voiture, outre le chauffeur,
deux officiers allemands et un lieutenant français, servant d’otage, qui fait piteuse
figure. J’ai le cœur affreusement serré. Ce défilé m’a coupé l’appétit.
Samedi 22 juin. Ce matin je rencontre le
professeur Guyot qui m’annonce l’information que voici : « Heureuse
nouvelle, que je tiens de la bouche du maire, M. Delpierre : Saint-Quay ne
sera pas occupé. Les Allemands se sont installés à Etables, qui est le chef-lieu
de canton. »
Le
désordre est grand parmi les blessés qui remplissent les hôpitaux de
Saint-Quay. Ils n’obéissent plus aux ordres de leurs chefs et passent leur
temps à déambuler dans les rues ou à stationner devant les hôpitaux.
Dimanche 23 juin. Le
pronostic de M. Guyot ne s’est pas réalisé : aujourd’hui sont arrivés à
Saint-Quay, par camions, environ cent cinquante soldats
« vert-de-gris », qui ont été casernés à l’Hôtel Celtic. Les
Allemands ont préféré Saint-Quay à Etables.
Désormais
nous ne serons plus entre nous, nous les croiserons à tout bout de chemin. Nous serons épiés et surveillés. Quant à M. Guyot il les aura pour voisins. Les
premières mesures de l’occupation sont appliquées. Nous sommes soumis à la
juridiction allemande et il serait vain de protester. La circulation en ville
est limitée de 04h30 à 22h00, l’heure de l’Europe Centrale en avance d’une
heure sur la nôtre est instaurée, l’horaire des restaurants et cafés est réglementé. Enfin, l’écoute des postes de radio dans des lieux publics est strictement
prohibée.
Mercredi 26 juin.
Nous sommes coupés du monde extérieur. Nous vivons comme en plein Moyen-Age. Les
soldats allemands prennent possession du pays. Ils envahissent les rues, les
cafés et aussi la grande plage de Saint-Quay.
Saint-Quay-Portrieux
est occupée. Le cafard sévit. J’en suis atteint au suprême degré et souffre
cruellement du désœuvrement. Je pleure.
Arnaud Collin, texte librement adapté du Journal d’Ambroise Got
Arnaud Collin, texte librement adapté du Journal d’Ambroise Got
super intéressant bravo Arnaud
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